L’association Stop au porno n’est pas seule pour lutter contre la pornographie. Le combat est international ! Pierre Beauregard est notre référent au pays des Caribous. Québécois, père de famille et ancien addict, il s’est engagé contre le porno, dont il connaît les ravages. Il a accepté de donner une interview pour Stop au porno.
- Bonjour Pierre, pour quelle raison as-tu décidé d’investir de ton temps pour lutter contre la pornographie ?
Je me rappelle m’être permis en 2000 de regarder des images pornographiques que je téléchargeais. Cette utilisation se faisait en catimini, je ne voulais surtout pas impliquer ma femme, et je ne voulais pas qu’elle le sache. Cette utilisation a continué et à chaque fois que la technologie progressait, ma curiosité me poussait à vouloir plus. D’ailleurs, je pouvais passer plusieurs heures la nuit à consommer ces contenus, pendant que tout le monde dormait. Mais je suis devenu progressivement honteux de mon comportement et j’ai décidé de mettre fin à cette addiction : le processus a pris plusieurs mois. C’est finalement en 2013 que j’ai regardé du porno pour la dernière fois. Je me contentais à ce moment d’être heureux de vivre plus sainement.
En 2016, tout a changé. J’ai entendu le compte rendu d’une méga-conférence aux USA qui parlait des torts de la pornographie. Il s’agissait du Set Free Summit qui regroupait les meilleures organisations ayant développé une expertise sur ce sujet. J’ai eu la possibilité de m’inscrire pour suivre une formation de mentorat en intégrité sexuelle avec l’un des exposants, Michael Leahey de BraveHearts. À la suite de cette formation, j’ai commencé à être coach pour aider des hommes de tout âge à surmonter cette addiction.
- Peux-tu présenter ton ou tes actions dans ce combat ?
Je suis un facilitateur de groupes qui se rencontrent une fois par semaine pour un peu plus d’une heure et suivent un parcours pour partager leur bataille contre cette compulsion non souhaitée, qu’ils désirent éliminer de leur vie. Le programme inclut du contenu à lire et des vidéos à visionner. Nous cherchons à expliquer le processus d’addiction et nous visons une vie sans secrets que le groupe permet d’expérimenter en toute confidentialité. Les valeurs que nous faisons vivre sont : grâce, honnêteté, intégrité, redevabilité et courage. Vous pouvez en apprendre plus sur le site de High Noon.
De plus, je suis un activiste et je milite en faveur d’actions législatives pour protéger les enfants de l’accès à la pornographie par la vérification de l’âge en ligne.
- Peux-tu éclairer le lecteur sur les enjeux de la lutte contre la pornographie au Canada ?
MindGeek, numéro 1 mondial du porno, a son principal lieu d’affaire au Canada. Triste réalité pour les canadiens ! Depuis l’été 2020, suite au Global Summit du National Center On Sexual Exploitation, une coalition informelle regroupant des activistes, dont Glendyne Gerrard de Defend Dignity, Jocelyn Monsma de Connecting to Protect, Marilyn Evans de Parents Aware, et quelques autres, se rencontrent toutes les 2 semaines dans le but principal de soutenir les efforts législatifs pour mettre en place la vérification de l’âge sur les sites pornographiques.
- Pourquoi le pays parait-il à l’avant-garde sur le sujet ?
En 2015, le député conservateur Arnold Viersen de l’Ouest Canadien, qui ne se cache pas d’être chrétien, a été élu. Il a proposé la motion 47 pour étudier les torts de la pornographie (voir les détails de l’étude ici). Mais les recommandations nous ont laissé sur notre faim.
À cet époque, l’intérêt pour le sujet est limité au Québec. Je me suis alors impliqué avec deux autres citoyennes, Isabelle Laurin et Jehu Hernandez, en mettant sur pied une pétition qui a recueilli plus de 2000 signatures, soumise par la suite à l’Assemblée Nationale par l’élue Rita de Santis (voir la pétition ici).
Le 8 mars 2020, lors d’une manifestation près des locaux de MindGeek, la sénatrice Julie Miville-Dechêne s’est exprimé devant les médias. Je lui ai alors présenté le dossier de la vérification de l’âge et mis en contact avec Ernie Allen de Child Dignity Alliance. Elle s’est saisie de ce dossier et le 30 septembre 2020 a présenté le projet de loi S-203 (loi limitant l’accès en ligne des jeunes au matériel sexuellement explicite). De plus, la sénatrice s’est jointe au groupe parlementaire multipartite de lutte contre l’esclavage moderne et la traite des personnes.
Puis l’article du New York Times du 4 décembre 2020, dénonçant les pratiques de Pornhub, a provoqué une vive réaction du gouvernement canadien. Les parlementaires travaillent d’ailleurs sur le sujet au sein du Comité de l’éthique : vous pouvez lire les témoignages et mémoires ICI.
En fin de compte, la raison principale de ce succès au Canada est que des coalitions regroupant toutes les tendance politiques ont été mises sur pied.
- Comment vois-tu l’avenir de la lutte contre la pornographie ? Es-tu optimiste ou pessimiste sur le sujet ?
Je suis une personne optimiste, donc je ne peux être pessimiste sur le sujet. La bataille doit continuer sur tous les plans et nous devrons persévérer longtemps. Oui, c’est vraiment une bataille : nous avons besoin de projets éducatifs pour les parents afin de les outiller à la discussion sur des sujets épineux avec leurs enfants. Je crois que Stop au Porno fait un excellent travail à ce sujet. ParentsAware au Canada et d’autres s’impliquent dans ce but.
Je crois que le domaine des arts doit contribuer à éveiller les consciences du public. À ce titre je soutien les efforts de SeeItEndIt.org.
Et je crois aussi à la force de l’esprit de la prière. Imaginons et œuvrons sans relâche pour une monde dans lequel tous les humains seront respectés et aimés. Aucun être humain n’est une marchandise à consommer ou à vendre.